Docteur Jacques Lucas
président de l’Agence du numérique en santé
« Numérique et démocratie en santé ne sont pas antinomiques »
Quel souvenir gardez-vous de votre première rencontre avec Didier Ambroise ?
« J’ai connu Didier Ambroise en 2017, dans le sillage des expérimentations dites «Territoires de soins numériques (TNS) » pilotées par la Direction Générale de l'Offre de Soins (DGOS) dans sept régions. Nos échanges ont porté principalement sur les objets connectés. Les résultats de TSN ont été riches d’enseignement, notamment en démontrant qu’il y avait encore une longue marche à faire pour que les professionnels de santé et les patients adoptent les outils numériques. »
Depuis Territoire de Soins Numérique (TSN), avez-vous le sentiment que Doshas Consulting contribue, dans ses engagements et ses missions, à défendre un numérique en santé au service des patients, dans un cadre éthique et respectueux des données de santé ?
« A l’époque de TSN, j’ai conduit une mission pour le Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM) et j’ai pu constater que tous les acteurs institutionnels et professionnels étaient particulièrement sensibles au respect du cadre juridique, législatif ou réglementaires. J’avais aussi fait observer que les aspects déontologiques étaient importants et qu’il fallait lire le code dans ses applications au monde numérique comme un moteur et non un frein, si on se référait aux bases éthiques sur lesquelles ce texte réglementaire se justifie. J’observe aujourd’hui que la Délégation ministérielle au Numérique en Santé (DNS) comporte une cellule éthique en ce sens et que ses travaux, auxquels je participe cette fois entant que président de l’Agence du Numérique en Santé (ANS) figurent dans un cadre de référentiels qui deviendront opposables. C’est de l’éthique au concret si je puis dire. Naturellement, je me réjouis que des sociétés comme Doshas consulting défendent aussi ces orientations. »
En mai 2018, nous vous consacrions un Parcours intitulé « Médecine et numérique : entre fascination et appréhension ». Que vous inspire-t-il aujourd'hui ?
« Que je n’ai pas changé d’avis. Ce texte de 2018 reste d’actualité et démontre que tout changement durable nécessite du temps long. Les innovations vont aujourd’hui très vite, mais leur appropriation réelle demande du temps face à la force des habitudes. Il ne faut pas désespérer de cela. J’avoue cependant ressentir parfois la tentation de ne plus cultiver que mon jardin… »
Quelle est votre vision de notre système de santé pour demain ?
« Le système de santé sera piloté grâce au traitement massif des data en temps réel. Bien entendu, cela ne veut pas dire que ce seront les machines qui décideront mais elles alimenteront les réflexions et les choix politiques. Numérique et démocratie en santé ne sont pas antinomiques. Dans ce système, les professionnels de santé pourront tous se consacrer au cœur de leurs métiers, à savoir accompagner et soigner les personnes avec compétence, dévouement et humanisme. Des coopérations structurées entre les professionnels intervenant dans le système de santé sont indispensables pour la qualité, la sécurité des soins et les prises en charge médico-sociales. Les moyens apportés par l’intelligence artificielle dans l’exercice des métiers vont en modifier les contenus et les contours.
Tout cela va demander de déployer une information claire, loyale, humble et appropriée à destination de tous les citoyens. Les enjeux de cohésion sociale sont considérables, d’où la nécessité de donner un cap clair, le partager et avancer ensuite avec détermination.
Pour parvenir à naviguer en haute mer, affronter des vents turbulents et arriver à bon port, il faudra disposer d’une boussole, de phares et de balises. C’est un nouveau mode qui s’ouvre devant nous. Il est compréhensible qu’il suscite à la fois des espoirs motivants, des appréhensions, des inquiétudes et même des rejets. »
Que diriez-vous de l’évolution de Doshas Consulting ?
« Qu’il faut qu’elle continue »
Bio express

Cardiologue et néphrologue, Jacques Lucas a longtemps exercé au CHU de Nantes, avant de s’installer en libéral. Parallèlement à sa son activité médicale, il se présente aux élections ordinales dans son département de la Loire Atlantique, où il assure quelques années le poste de secrétaire général. Il est élu, en 1999, conseiller national de la région des Pays de la Loire et devient très rapidement président de la section de l’exercice professionnel, puis Secrétaire général du Conseil National de l’Ordre des Médecins (CNOM). Il en a été le 1er vice-président, avec une délégation générale sur le numérique en santé. Il est président de l'Agence du Numérique en Santé.
Conception : Doshas Consulting
Responsable de la publication : Didier Ambroise
Rédaction : Cécile Jouanel
Réalisation : Studio Bleu Canari